L’histoire du Tibet reste encore une thématique largement obscure, en dépit des recherches déjà entreprises par les historiens au cours des dernières décennies. Toutefois, le volume de textes à investiguer est proprement inimaginable. La partie préparatoire du présent projet, visant à explorer une partie de ce matériel encore inexploité, sera réalisée par des spécialistes dont les compétences incluent : d’évidentes dispositions en matière de philologie (une connaissance optimale de la langue tibétaine classique), une solide formation dans le domaine religieux tibétain, et une familiarisation évidente avec le genre hagiographique tibétain.

Pour s’engager dans ce travail préliminaire, il faudrait idéalement choisir, parmi les nombreuses lignées religieuses tibétaines, une tradition :

  • qui a gardé un sens bien défini de son identité singulière au cours des siècles ;
  • qui a joué un rôle important dans de nombreux aspects de la vie religieuse tibétaine, et dont l’étude est susceptible d’éclairer de nombreux aspects inconnus de l’histoire culturelle et politique tibétaine ; et
  • qui est suffisamment documentée par une littérature bien préservée.

Les chercheurs associés à ce projet ont choisi une branche de l’Ecole Ancienne (rNying ma) du bouddhisme tibétain : le Byang gter ou système des « Trésors du Nord ». Son origine remonte à l’année 1366, lorsqu’un « découvreur de trésors » nommé Rig ‘dzin rGod ldem (1337–1408) découvrit une collection d’ouvrages qui allait initier la tradition des Trésors du Nord. Depuis lors, cette tradition s’est répandue dans différentes régions du Tibet et une collection récente compilant 63 volumes appartenant à ce système vient d’être mise à la disposition des chercheurs, avec de nombreux textes et cycles qui étaient jusqu’alors inconnus ou considérés comme perdus. Bien que son terminus ad quo soit le 14e siècle, une grande partie du matériel contenu dans ces textes est censé remonter au 8e ou au 9e siècle, même si cette nouvelle collection contient également des œuvres appartenant au 20e et au 21e siècle. Au cours de l’histoire, les Trésors du Nord sont devenus une branche indépendante au sein de l’école ancienne du bouddhisme tibétain, avec toutes ses traditions spécifiques et ses caractéristiques internes. Elle a atteint son apogée avec la fondation du monastère de rDo rje brag (au début du 17e siècle), en se développant sous le règne du 5e Dalaï Lama (1617–1682), avec l’activité du célèbre maître Rig ‘dzin Padma phrin las (1641–1717). Le système des Trésors du Nord est également répandu aujourd’hui dans l’Himalaya, parmi les populations locales dont la religion est le bouddhisme tibétain.

Une part notable des textes appartenant à cette tradition révélée a acquis une réputation exceptionnelle qui se maintient encore aujourd’hui parmi les adeptes de l’Ecole Ancienne, par exemple les cycles tantriques liés à la divinité Vajrakīla ou ceux relevant de la « Grande Perfection » (rDzogs chen), notamment avec l’un des plus importants recueils de ce système, connu sous le nom de La Transparente Contemplation de Samantabhadra (Kun bzang dgongs pa zang thal). La lignée des Trésors du Nord a également bénéficié d’un soutien royal au Tibet (avec le roi de Gung thang), mais aussi plus récemment avec l’actuel roi du Bhoutan et certains de ses prédécesseurs.

Une caractéristique unique des Trésors du Nord comparée à d’autres corpus littéraires de même nature, est que la collection originale a été complétée au cours des siècles (essentiellement entre le 14e et le 18e siècle) par la découverte d’autres trésors (gter ma), soit par des réincarnations successives de Rig ‘dzin rGod ldem, soit par d’autres maîtres qui lui sont étroitement liés.

L’une des sources centrales de ce projet est une histoire récente du Byang gter, qui occupe près de 900 pages. De larges sections de ce texte seront traduites, éditées, et complétées par un appareil de notes et de remarques critiques. En dépit de son volume, ce texte n’est qu’un recueil de faits sur lesquels nous disposons, dans de nombreux cas, d’autres sources plus détaillées (comme les biographies et autobiographies des maîtres de la lignée). Nous devrons donc inclure dans le champ des recherches les documents antérieurs au 14e siècle concernant le corpus qui a historiquement fusionné avec les Trésors du Nord en tant que branche indépendante de l’Ecole Ancienne (rNying ma) ; il conviendra également de fournir des descriptions des cycles inclus dans ce système et de discuter des Trésors du Nord tels qu’ils figurent dans la tradition Bönpo.

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histoire littérature révélée (gter ma) tibétologie

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Participants

Responsables

Stéphane Arguillère (Ifrae)
Jay Valentine (Troy Univ.)
Jean-Luc Achard (CNRS)

Membres CRCAO

Membres titulaires
Jean-Luc Achard (CNRS)

Appui à la recherche
Tenpa Tsering Batsang (Collège de France)

Participants hors laboratoire

Stéphane Arguillère (Ifrae)
Jay Valentine (Troy Univ.)
Cécile Ducher