L’objectif de ce projet qui s’inscrit dans la durée est d’opérer un changement d’angle de vue et de regarder le monde à partir du « Kyūshū ». Le « Kyūshū » est compris ici comme une aire géographique et culturelle complexe, sans frontières, reliée par de multiples réseaux au continent, au royaume des Ryūkyū, à l’Asie du sud-est et aux régions du centre du Japon. Nous tenterons d’une part d’approfondir la connaissance des particularités des fiefs présents sur ce territoire (Satsuma, Kumamoto, notamment): leur histoire, leurs ressources, leurs rivalités ou leur complicité, leur rapport avec le pouvoir central. On s’intéressera aux axes de communication terrestres et maritimes, à l’intérieur et à l’extérieur du Kyūshū. Il s’agira d’autre part d’envisager une micro-histoire globale du Kyūshū : en replaçant l’île dans son environnement international, il devient possible de « globaliser » l’histoire de ce territoire et d’examiner des événements dont l’impact a pu être important à différentes échelles, du local au global en passant par le régional.

Pour atteindre cet objectif, on se gardera de s’imposer des limites temporelles trop strictes : on inclura aussi bien l’époque médiévale (avec notamment la question de la piraterie japonaise) que les premières décennies de Meiji, même si la période s’étendant du XVIe au milieu du XIXe siècle sera au cœur de nos préoccupations.

Axe 1 : Une histoire de la migration

Le Kyūshū est sans doute l’île qui dans le Japon a absorbé le plus grand nombre de populations d’origine étrangère au cours de la période prémoderne. Il s’agissait souvent de populations accueillies pour leur savoir-faire technique. On pense notamment aux potiers coréens mais aussi aux lettrés, aux moines bouddhistes ou aux médecins d’origine chinoise qui s’y sont installés ou qui y ont transité. Cela a été aussi une terre d’accueil ou un lieu de passage souvent obligé pour les naufragés et les réfugiés. La présence d’une population européenne – réduite officiellement aux Hollandais à partir du milieu du XVIIe siècle – retient également l’attention ainsi que celles d’origine est-asiatique. On oublie aussi trop souvent qu’une partie de la population des fiefs du Kyūshū et de Nagasaki entretenait, de par leurs fonctions, des liens étroits avec des populations étrangères. C’était notamment le cas de figures d’intermédiaires comme les interprètes, mais aussi des Japonais en contact avec les habitants du royaume des Ryūkyū,  et de Corée et de la péninsule indochinoise.

Axe 2 : Une histoire économique

Le commerce était florissant dans certaines villes portuaires du Kyūshū : Nagasaki, Hakata, Kagoshima, Imari, Moji, etc. Le poids économique des fiefs du Kyūshū et des marchands de Nagasaki pourra être abordé, à travers des collaborations avec des spécialistes de cette question au Japon, aux Pays-Bas, en Corée, ou en Chine ou au Vietnam. On imagine également qu’une économie spécifique s’est développée, notamment à Nagasaki, du fait de la présence de marchands d’origine étrangère. On pense notamment à l’élevage et, à la fabrication de porcelaine destinée à l’exportation. Il faut par ailleurs ajouter l’existence d’un commerce de contrebande, sans doute non négligeable, mais que les historiens ont encore peu exploré.

Axe 3 : Une histoire culturelle et religieuse

La région du Kyūshū a également été entre le XVIe et le XIXe siècles, un lieu de rencontres mais aussi de confrontations entre les religions. C’est la région où se concentraient les convertis à l’époque du siècle chrétien, mais aussi celle qui a accueilli nombre de moines bouddhistes venus du continent. L’empreinte des idées shintô est également profonde, et ce, dès les premières décennies du XVIIe siècle, même si le sujet n’a pas fait l’objet jusqu’ici d’une grande attention. Plus que l’histoire de ces religions prises une à une, on s’intéressera à l’histoire des rencontres, des croisements et des hybridations.

De même, les fiefs du Kyūshū ont été le lieu de réception privilégié des savoirs et des techniques. L’importance de la ville de Nagasaki comme lieu de circulation des livres est bien connue. Toutefois, les études existantes n’ont pas nécessairement approfondi le rôle des savants de cette ville, ou encore celui des savants des fiefs du Kyūshū. Il paraît également intéressant de se pencher sur la culture spécifique  de cette région, du fait de sa riche histoire et des occasions de contact avec les marchands d’origine étrangère ou des facilités d’accès des livres d’origine chinoise ou hollandaise.

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Inscription disciplinaire

histoire du Japon histoire prémoderne

Participants

Responsables

Annick Horiuchi 堀内アニック・美都 (Université Paris Cité)
Pierre-Emmanuel Roux (Université Paris Cité)

Membres CRCAO

Membres titulaires
Annick Horiuchi 堀内アニック・美都 (Université Paris Cité)
Martin Nogueira Ramos (École française d'Extrême-Orient)
François Lachaud (École française d'Extrême-Orient)
Frédéric Girard (École française d'Extrême-Orient)

Membres associés
Nathalie Kouamé (Université Paris Cité)
Pierre-Emmanuel Roux (Université Paris Cité)
Nicolas Mollard (Université Lyon 3)
Guillaume Carré (École des hautes études en sciences sociales)

Post-doctorants
Yuta Segawa (Indépendant)

Doctorants
Céline Zuretti (Université Paris Cité)
Daniel Said Monteiro (Université Paris Cité)
Colin Deschamps (Université Paris Cité)
Sophie Le Berre (Université Paris Cité)

Participants hors laboratoire

Pierre-Emmanuel Bachelet (ENS Lyon)
Noriko Berlinguez-Kono (Université de Lille)
Alexandre Roy (IFRAE)
Akiyo Kudō-Herledant (doctorante IFRAE)
Damien Peladan (post-doctorant CCJ)
Rebekah Clements (ICREA, Universitat Autònoma de Barcelona)
Wim Boot (Université de Leiden)